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4. Conception de la pièce


I. Activités préalables et nécessaires à la conception de la pièce


A. L'entrée dans le projet & le Concours

Les premières heures de travail ont été consacrées :

  • à la présentation du concours lui-même et à l'analyse du sujet présenté, conformément aux principes de la co-intervention, sous la forme de la situation professionnelle suivante :

"La Flamme de l’Égalité vous demande de créer un ensemble de pièces en cuir répondant à la thématique 2022 de son concours : "Travailler en esclavage". Pour des raisons pratiques, vous présenterez votre démarche et expliquerez vos créations sur un support vidéo d'une durée maximale de quatre minutes."

  • à une mobilisation, sous forme de cartes mentales centrées autour de la notion de travail qui a une définition très large et d'esclavage, des connaissances des élèves sur cette thématique 2022,

  • à un premier apport de connaissances nécessaires au choix et à la justification du titre du projet ainsi qu'à la construction des problématiques générales,

Exemple de connaissances amenées aux élèves

  • Formulation des problématiques du projet :

- Quelles réalités recouvraient et recouvrent encore le fait de travailler en tant qu'esclave ?

- Quels travaux les esclaves étaient-ils et sont-ils encore contraints de mener en raison de leur condition ? Avec quelles conséquences ?


Cette introduction a amené les élèves à construire une définition précise de travail forcé, d'esclave dont l'existence dépend entièrement des décisions de son maitre et d'esclavage que la classe a défini comme étant une privation de liberté d'un individu et sa soumission totale à un autre. Il est donc une négation de l'être humain qui est réduit à l'état de force de travail brut. L'idée que l'esclavage ressemblerait à un "droit de propriété" a également été formulée.


Une étape de la réflexion des élèves


Une fois ce travail réalisé, les enseignantes ont écrit, au tableau, cette simple phrase extraite de Candide : "C'est à ce prix-là que vous mangez du sucre en Europe" afin que les élèves puissent formuler des horizons d'attente, commencer leur réflexion et démarrer leur aventure créatrice.


Puis, pour assouvir leur curiosité suscitée par cette citation de Voltaire, vint la séance intitulée : Le prix humain du sucre de canne & autres gourmandises du XVIIe au XIXe siècle.


B. Une séance particulière autour du travail esclave

1. Présentation générale de la séance

Cette séance répondait aux deux problématiques suivantes :

  • Dans quelle mesure était-ce à « ce prix là » que l’on mangeait du sucre de canne et autres gourmandises en Europe du XVIIème au XIXème siècle ?

  • Quelles réalités recouvrait le fait de travailler en esclavage dans une plantation sucrière ?

Ci-dessous la séance étudiée par les élèves :





2. L'hétérogénéité du travail esclave du XVIIe au XIXe siècle

Ces documents ont amené les élèves à comprendre qu'il existait une très forte hétérogénéité des métiers et des situations au sein des habitations où certains pouvaient en effet être :

  • des esclaves domestiques qui s’occupaient de la maison des propriétaires avec qui ils étaient en lien direct. Ils pouvaient être cuisiniers/cuisinières, cochers, lingères, servantes, nourrices des enfants du maitre, ...,

  • des esclaves spécialisés dans un métier dits "à talent" en raison de leurs savoir-faire particuliers. Leurs occupations étaient être très diversifiées (fabrication de tonneaux, raffinerie du sucre, ...). Ils pouvaient travailler en tant que menuisiers, charrons, forgerons, ...,

  • des esclaves cantonnés aux travaux des champs de canne à sucre et désignés, à l'époque, de "Nègres de jardin" ou "Nègres de houe", comme en Guadeloupe et Martinique. Ils accomplissaient le plus souvent les tâches les plus dures comme le défrichement, la plante de la canne, son entretien lors de la pousse, l'apport en fumier, etc.

  • D'autres étaient "cabrouetiers" ou charretiers, muletiers, "ratiers" (esclaves chargés de détruire les rats) ou encore, par exemple, hospitalières (femmes esclaves, généralement âgées, remplissant, sans qualification particulière, la fonction d’« infirmières » dans « l’hôpital » de l’habitation),

  • D'autres encore travaillaient dans les ateliers, au milieu des machines et des étuves où le jus de canne était transformé en sucre. Les conditions de travail y étaient très difficiles, les accidents nombreux laissaient souvent l'esclave mutilé à vie.

Ce dernier point a été notamment approfondi par Monsieur Bros, Professeur de Maths-Sciences, au sein d'une séance centrée sur la fabrication du sucre de canne qui a permis aux élèves, à travers l'étude de ce processus de transformation, de comprendre la diversité du travail esclave ainsi que sa dangerosité.


Sur les plantations, le travail pouvait dépendre de l'âge, de l'état de santé et parfois même du lieu de naissance des esclaves, et non pas du sexe des esclaves. Il n'y avait pas, en effet, à proprement parlé, de division sexuelle du travail ; seules la robustesse et la force physique décidaient de la distribution des tâches agricoles. Ainsi, par exemple, les tâches de gardiennage et de surveillance des animaux étaient confiées aux vieillards et aux enfants qui étaient aussi sollicités pour l'arrachage des mauvaises herbes. Néanmoins, il est à noter qu'aux hommes revenaient les emplois de commandeurs, de raffineurs, d’ouvriers, de "cabrouetiers" et de muletiers, de cuisiniers et de valets alors que 55% des domestiques étaient des femmes. Elles pouvaient être couturières, blanchisseuses, servantes, gardiennes d’enfants, etc.


Le travail des esclaves et son intensité étaient liés au rythme des saisons et aux cycles de la canne ainsi qu'à la volonté du maitre, l’esclave étant contraint de travailler autant que ce dernier l'exigeait. Ils travaillaient du lever du soleil jusqu'à son coucher, tous les jours de la semaine sauf le dimanche.


Mais il existait de grandes différences entre les esclaves. Certains pouvaient, par exemple, être chargés de fonctions leur conférant beaucoup d'autorité et de responsabilités comme :

  • l'esclave commandeur qui était chargé d’organiser le travail des esclaves, de les surveiller mais aussi d'appliquer les sanctions décidées par le maître,

  • l'esclave raffineur qui était celui chargé de la cuisson du sucre et qui faisait partie de l'élite des travailleurs de la sucrerie.

Le travail était donc, dans les plantations, très hiérarchisé, ce qui aboutissait au fait que certains esclaves pouvaient jouir de certains privilèges et étaient mieux traités que d'autres comme les esclaves domestiques. Leur situation était néanmoins très fragile car elle pouvait être remise en cause à tout instant par le maitre.


Ces documents ont également conduit chacun des élèves à mener, de manière individuelle, une recherche sur la réglementation du travail des esclaves, à savoir le Code noir de 1685 et à mesurer les écarts qui pouvaient y avoir entre ce dernier et la réalité. Ce travail les a amenés à comprendre comment ce Code a instauré et affirmé l’autorité absolue du maître sur ses esclaves ainsi qu'à justifier, légitimer et assurer le maintien de l’ordre par les punitions et les mises à mort.


D'autres activités ont aussi été proposées aux élèves afin qu'ils comprennent bien tous qu'il existait aussi des esclaves en dehors des plantations. Certains travaillaient dans des manufactures, d'autres dans des mines comme celles de diamants au Brésil ou encore dans des villes où ils accomplissaient aussi une grande diversité de tâches.

Certains, dans les manufactures comme les chaufourneries ou les bonifieries, pouvaient, en effet, fabriquer de la chaux ou torréfier le café. D'autres pouvaient être potiers, couturiers ou tailleurs. D'autres encore travaillaient dans des tanneries, des fabriques de tabac, etc. Quelques uns étaient pêcheurs, maçons, charpentiers, bouchers ou encore boulangers. Les transports étaient aussi un secteur qui mobilisait beaucoup d'esclaves. Beaucoup étaient dockers. Certains cumulaient plusieurs occupations, prouvant leur grande capacité d'adaptation. Ainsi, travailler en esclavage recouvrait bien des réalités, des conditions et des situations sociales très différentes.

Esclaves dans une mine de diamants au Brésil au XVIIIe siècle

Carlos Julia, aquarelle, Bibliothèque nationale du Brésil, vers 1770.


2. Les multiples conséquences du travail esclave du XVIIe au XIXe siècle

Cette séance de travail les a aussi amenés à réfléchir sur les conséquences et sur comment les esclaves pouvaient tenir face à de telles conditions de travail, aux éléments ayant amené tant d'êtres humains à n'avoir pas d'autres choix que la subordination, la soumission et l'obéissance pour survivre, à l'omniprésence de la peur et de la terreur, des menaces, des humiliations, des tortures, etc.


Ce questionnement autour des conséquences du travail esclave les a alors conduits à s’intéresser aux multiples formes de refus, de rejet, de vengeance et de résistance passive et/ou active qu'ils pouvaient mettre en œuvre comme, par exemple, le suicide, l'automutilation, la lenteur ou le ralentissement du rythme de travail, le sabotage des outils ou des machines, le vol, l'empoisonnement du bétail semant la peur chez les maitres, les incendies des habitations notamment, les alliances et les associations entre esclaves et ceux affranchis ou encore le marronnage qui est un mode universel de résistance à la puissance absolue des maîtres que les esclaves noirs et amérindiens adoptèrent pour échapper à toutes les brutalités et aux mauvaises conditions de vie et de travail dont ils étaient victimes, en fuyant dans des zones difficiles d'accès comme les montagnes ou les forêts. Certains organisèrent même des révoltes armées comme à Saint-Domingue en 1794 avec Toussaint Louverture. Ce dernier point a été, par la suite, largement étudié dans le cadre de la séquence n°2 d'histoire intitulée : L’Amérique et l’Europe en révolution (des années 1760 à 1804).

Les work songs ou chants de travail qui ont inspiré le gospel servaient aussi à lutter et à résister à la domination, aux maitres et aux souffrances car ils pouvaient servir de moyens de communication entre les esclaves. Ces chants permettaient en effet de transmettre des messages codés aux autres ou encore de faire passer des informations sur leurs conditions de vie et de travail notamment aux nouveaux arrivants. Les esclaves y exprimaient également leur refus et leur rage.

Quelques chants de travail ont été étudiés au sein d'une séance particulière centrée sur l'écoute et l'analyse de quelques work songs.

Trois ont retenu l'attention des élèves :

Il est à noter que certaines stratégies de résistance ont donné naissance à des préjugés raciaux que ce soit ceux en lien avec la paresse et l’oisiveté ou encore ceux relatifs à la force physique et à la difficulté de se plier à la discipline des Africains.


Exemple de quelques notes prises en cours par une élève sur ce thème


Ce travail notamment autour des conséquences a été enrichi par l'analyse du troisième volet du documentaire Les routes de l'esclavage intitulé 1620-1788 : du sucre à la révolte.

Ce visionnage a permis aux élèves de mieux réaliser la dureté et les conséquences physiques du travail esclave, en y entendant, par exemple, des archéologues évoquer le fait que les squelettes d'esclaves qu'ils avaient découverts dans un cimetière en Guadeloupe étaient ceux d'adultes de moins de 30 ans mais qu'ils ressemblaient à ceux de personnes âgées de plus de 70 ans, en raison de la grande pénibilité des conditions de vie et de travail dans la canne. L’étude de ces ossements a mis en avant à quel point ils étaient mal nourris, l'usure de leur corps en raison d'un travail intensif et le fait que beaucoup étaient affaiblis par des maladies comme la tuberculose. Les élèves ont été très émus en apprenant que l'espérance de vie dans les plantations sucrières ne dépassaient pas 10 ans.

Ces multiples conséquences du travail esclavage ont conduit à sa condamnation et à sa suppression qui ont été traitées par les élèves à travers un petit travail de recherche à l'échelle mondiale. Il avait aussi pour objectif de montrer aux élèves que, malgré les abolitions, des êtres humains ont continué et continuent à travailler en esclavage.





3. Évolutions et conséquences du travail esclave depuis la fin XIXe siècle jusqu'à aujourd'hui

Et, afin d'approfondir leurs connaissances ainsi que de les sensibiliser aux évolutions du travail contraint sévissant encore dans le monde d'aujourd'hui et à ses conséquences, leurs deux professeures leur ont proposé une nouvelle activité inspirée d'une partie de la citation de départ "C'est à ce prix là que vous avez ..." accompagnée de la liste suivante :

- un chemin de fer Congo-Océan,

- des tapis (Iqbal Masih au Pakistan),

- des briques pour construire vos maisons (Ibrahim et Jafar en Afghanistan),

- des maisons propres (Sonu à Jessore et Nisha en Inde),

- des personnes sexuellement exploitées (Jana Kohut),

- du coton récolté (la Chine et les Ouïghours),

- des habits pas chers (les ateliers de confection clandestins en France, en Italie et en Angleterre).

Divisée en groupes, la classe a expliqué et justifié chacune des affirmations obtenues et les divers groupes constitués ont mené leurs propres recherches afin de les présenter à tous, sous forme d'exposés ou de discours, en réinvestissant tout ce qui a été vu, en parallèle, au sein de la séquence n°1 de français : "L'éloquence, une arme de lutte !".

Répartition du travail entre les élèves et Constitution des groupes

Photographie prise au cours de ce travail

Exemple de travail réalisé par deux élèves sur Jana Kohut :

Un second mené par un élève sur les ateliers de confection clandestins dans trois pays européens :

Un troisième sur le travail contraint des Ouïghours forcés de récolter le coton en Chine :

Un quatrième sur la servitude pour dette et la fabrication de briques en Afghanistan :

Un cinquième sur Iqbal Masih et l'esclavage dans les fabriques de tapis au Pakistan :

Un sixième sur la construction du chemin de fer Congo-Océan :

Concernant la construction de ce chemin de fer, ces deux élèves ont tenu à vous faire partager une vidéo qu'elles ont trouvée au cours de leurs recherches et que vous pouvez découvrir en cliquant ici.


Ces activités leur ont permis de prendre conscience de l'importance encore aujourd'hui de l'esclavage dans le monde où plus de 200 à 250 millions d'adultes en sont encore victimes, selon l'Organisation des Nations Unies et ses institutions spécialisées comme le Bureau international du Travail auxquels s'ajoutent plus de 200 millions d'enfants âgés de 4 à 17 ans. Les femmes et les filles représentent 71% des victimes.

Elles les ont aussi conduits à identifier et comprendre les formes actuelles prises par ce travail esclave, ses évolutions, ses permanences et ses conséquences.


L'étude du travail esclave moderne et de ses conséquences a été prolongée et approfondie par deux intervenantes, membres d'Amnesty International, le 18 mars 2022, Mesdames Olive et Oury.

  • Elles leur ont présenté l'association, son histoire et ses valeurs,

  • elles leur ont rappelé la nécessité encore aujourd'hui de la Déclaration des Droits et de l'Homme de l'ONU ainsi que de défendre les Droits humains,

  • elles leur ont réexpliqué l'importance de la Dignité, de la Mémoire, de la Liberté, ...

  • elles leur ont également évoqué le sort des travailleurs immigrés sur les chantiers lancés en vue de la Coupe du Monde 2022 de football au Qatar et l'esclavage domestique qui sévit de nos jours en France ainsi que leurs conséquences sociales, économiques, humaines, etc.

Nos deux intervenantes d'Amnesty International




Les évolutions prises par le travail esclave et ses conséquences au cours des siècles ont aussi été évoquées et travaillées au sein de la séquence d'EMC traitant du thème La Liberté, nos libertés, ma libertés. Cette dernière a été construite à partir de plusieurs questions dont la suivante : "Pourquoi priver des êtres humains de leur(s) liberté(s) ?" Cette séance a donné lieu à une discussion sur les raisons de la persistance de ces pratiques esclavagistes fondées entre autres sur la pauvreté, l'ignorance, l'intolérance et la cupidité. Les élèves y ont aussi identifié et caractérisé les évolutions, depuis le XVIIe, siècle, de l'idée d'une liberté individuelle inaliénable.

L'intégralité de ces activités ainsi que celles réalisées, en parallèle, en Anglais avec Mesdames Kohler et Jain sur l'esclavage moderne et le travail servile en Inde, aux Philippines et dans divers pays africains, mais également celles menées en Français, en Histoire et en EMC ont conduit les élèves à très vite concevoir l’œuvre qu'ils voulaient présenter au concours.

Exemple de travail de réflexion mené par une élève en Anglais



La Mémoire de l'esclavage et ses enjeux ont été de nombreuses fois abordés par les élèves au cours du projet. Afin de les sensibiliser encore davantage à cette dimension mémorielle, les élèves ont eu la chance, le 09 mai 2022, de rencontrer Monsieur Jean Lafaurie, un ancien déporté au camp allemand de Dachau pour actes de résistance.


Photographie de Monsieur Jean Lafaurie prise le 09 mai 2022

au lycée polyvalent Flora Tristan

D'autres photographies de l'intervention sont à retrouver en cliquant ici.


II. Conception définitive de la pièce


Séance de réflexion collective autour de la conception de la pièce

Les élèves ont déduit de leurs multiples activités et décidé de manière collective que leur pièce se composerait d'un sucrier présenté sous la forme d'un sac en raison des particularités, attentes et référentiels officiels de la section professionnelle des Métiers du Cuir et de la Maroquinerie. En outre, l'esclavage ayant traversé toutes les époques de l'Antiquité à nos jours et étant un phénomène mondial ainsi qu'une réalité multiforme aux travaux serviles pluriels, a conforté les élèves dans ce choix.

Ce sucrier a été volontairement lacéré et abimé en référence aux violences inscrites dans les chairs et les corps ainsi qu'à la déshumanisation subies par les esclaves. Des mains d'hommes, de femmes et d'enfants y apparaissent également afin de montrer que ces derniers étaient réduits à de simples forces ou outils de travail. Des doigts manquent à certaines afin de montrer la dangerosité du travail esclave et les mutilations qu'il pouvait provoquer.

Ce sucrier est fait de cuir de différentes couleurs pour montrer la pluralité des victimes (sexes, ages, origines géographiques, etc), l'ancienneté et le maintien du travail servile au cours de toutes les époques historiques.


L'une des deux anses de ce sucrier est faite d'une guirlande de morceaux de sucre tachés de peinture rouge car teintés du sang et de la souffrance des esclaves. Ces derniers s'illuminent en référence aux idées des Philosophes des Lumières, à la mémoire de l’esclavage qui doit toujours rester vivante ainsi qu’à la lutte et à la dénonciation encore aujourd’hui du travail esclave.


La seconde anse est faite d'une chaine qui symbolise, entre autres, l'enchainement d'un homme (l'esclave) à un autre (le maître) dont il devient la propriété, la force et l'outil de travail ainsi que son enlèvement, sa déportation, sa vente et son arrivée dans l'habitation à laquelle il est désormais lié. Cette chaine illustre par exemple le sort de milliers de femmes vendues encore aujourd'hui à travers le monde comme cette "femme esclave" vivant enchainée dans la province du Jiangsu en Chine qui aurait été kidnappée puis achetée par un homme avec qui elle eut huit enfants.


Sur cette chaine sont positionnées des breloques rappelant quelques formes de travail servile comme :

  • un livre d’Ésope, célèbre fabuliste de l'Antiquité et ancien esclave,

  • un glaive et un trident pour les gladiateurs ainsi qu'en référence à Spartacus et au soulèvement d'esclaves qu'il dirigea,

  • deux tabliers : un blanc pour les domestiques et un marron pour les esclaves dits "à talents",

  • un dé pour les esclaves couturiers,

  • un filet de pêche pour les esclaves pêcheurs,

  • un pain pour les esclaves boulangers,

  • une pierre et un diamant qui évoquent le travail esclave dans les carrières et mines,

  • un grain de café et deux feuilles de tabac pour les esclaves travaillant dans les plantations,

  • une locomotive et un chemin de fer en référence à la construction de la ligne ferroviaire du Congo-Océan.

L'esclavage moderne y est aussi évoqué avec notamment la présence d'une brique et d'un tapis rouge, vert et bleu.


Ces divers accessoires ont pour objectif de montrer la réalité multiforme de cette violation des Droits de l'Homme ainsi que sa pérennité à travers différentes périodes historiques, de l'Antiquité à nos jours.


Photographie prise en 1896 montrant des esclaves enchainés ayant amené les élèves à vouloir utiliser une chaine, symbole d'asservissement, de déshumanisation, de la relation de soumission d'un esclave à son maitre, etc.


Première liste des breloques et répartition des fabrications entre les élèves

Les élèves auraient voulu également y faire aussi apparaitre, sur quelques maillons, le nom d'un acteur ayant défendu et/ou agi pour l'abolition de l'esclavage comme Voltaire, Bernardin de Saint-Pierre, Cyrille Bissette, Victor Schœlcher, Toussaint Louverture, le comte belge Hippolyte d'Ursel, l'Anglais Lloyd William Mathews, l'Espagnol Bartolomé de Las Casas, l'Américain Frederick Douglass ou encore Abraham Lincoln ainsi que des causes de sa persistance (pauvreté, cupidité, aveuglement, racisme, ...).

Cependant, craignant que la pièce soit trop surchargée et manque alors de lisibilité, ils ont décidé de ne faire apparaitre que quelques causes qui sont directement inscrites sur le sucrier.


Sur deux œillets du sac, seront fixées deux étiquettes en référence à celles que l’on trouve encore aujourd'hui et qui servent à afficher les prix des produits que l’on souhaite acheter, Elles établissent encore un lien avec la déshumanisation dont sont victimes les esclaves au cours de toutes les périodes historiques et qui sont encore aujourd'hui ravalés au rang d'objets et d'outils. Sur l'une est écrit Code Noir et sur l'autre est inscrite la citation de Voltaire qui est à l'origine de ce projet : "C'est à ce prix-là que vous mangez du sucre en Europe".


Dans ce sucrier, seront déposés :

  • un fouet réalisé sous la forme d'un bout de canne à sucre d'où pendent quelques lanières de cuir stylisant, une fois retourné, les racines de la plante et donc la cause de la déportation de millions esclaves vers les plantations commerciales du Nouveau Monde et des Caraïbes, le sucre.

Esclaves plantant de la canne à sucre

Illustration réalisée en 1826 par Amelia Opie.


Conception du fouet


  • une houe, outil agricole largement utilisé par les esclaves dans toutes les plantations. Elle montre la cruelle déshumanisation dont ces êtres humains ont été victimes, ayant été ravalés au rang de simples forces de travail, d'instruments et d'outils. Elle fait également référence à ceux qui étaient contraints de travailler dans les champs et que l'on appelait, en Martinique et en Guadeloupe, par exemple, les "Nègres de houe".

Illustration du XVIIIe siècle montrant des esclaves travaillant la canne à sucre

  • Sept bracelets en cuir, en référence à ceux portés par les esclaves et gravés aux noms de quelques un(e)s, hommes, femmes et enfants, souvent peu connu(e)s comme :

- Héva de la Réunion, compagne d'Anchaing, célèbre marron qu'elle rencontre dans une plantation avec qui elle s'échappe après avoir été fouettée pour avoir brisé un vase,

- Claire de Guyane française, esclave aussi marronne, étranglée et pendue pour avoir refusé sa condition servile et le travail esclave,

- Solitude la Mulâtresse de Guadeloupe, morte pour avoir résisté au rétablissement de l'esclavage et donc du travail esclave en 1802,

- Moima qui a été offerte en dot par un marié à son épouse, en 2015, en Mauritanie,

- Jana Kohut et Iqbal Masih,

- le Burundais Méthode Sindayigayat qui a été séquestré pendant dix ans de 2008 à 2018 dans un pavillon de Ville-d'Avray en France.




"Nul ne sera tenu en esclavage ni en servitude.

L'esclavage et la traite des esclaves sont interdits sous toutes leurs formes."

Déclaration universelle des Droits de l'Homme, Article 4, 1948.

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